L’information est un pont entre la réalité et l’activité humaine. Informer consiste à faire passer une connaissance à autrui. L’information est d’abord l’acte d’informer, puis l’objet immatériel que l’on transporte, c’est-à-dire les faits et les idées qui ont un sens pour celui qui les fait passer et, a priori, le même sens ou un sens proche, pour ceux à qui ils sont transmis par la voix, par l’écrit, par les ondes, par les réseaux.

Cela commence avec le premier marathonien, Phidippidès, qui en ~490 avant J.-C. court 42 km pour annoncer la victoire à son camp. Puis, parmi bien d’autres, les marins qui envoient des sémaphores, les garde-champêtres qui, munis de leurs porte-voix, diffusent les avis à la population, les Archives de la Planète d’Albert Kahn qui au début du XXe siècle relient la vie quotidienne des peuples du monde aux ethnologues et au grand public, les journalistes de presse, de radio et de télévision, jusqu’aux images de violence révolutionnaires capturées par un i-Phone qui font le tour du monde, le tweet-choc ou le tweet-tilt retwitté à l’envi, sans oublier les historiens et les préhistoriens qui font le lien entre ce qui a existé et la vie d’aujourd’hui, voire les prophètes et les Cassandre qui jettent un pont entre le futur et le présent…

L’objectif de l’information est d’un côté la volonté ou la responsabilité de faire passer du savoir à son réseau professionnel ou personnel, au travers de ponts technologiques et organisationnels ; de l’autre, le désir ou le besoin de savoir, de comprendre la réalité du monde dans lequel on vit, ou d’agir en complétant ou transformant l’information reçue pour en produire une autre, autrement dit pour construire un nouveau pont.

Cette transmission, cette information a deux exigences : la confiance entre l’informateur et l’informé, et l’utilité des données. La confiance est faite de valeurs partagées, sans quoi on verse dans la manipulation ou la propagande. L’utilité de l’information se mesure en termes de pertinence (elle me concerne), redondance (je ne l’ai pas déjà, qu’est-ce que cela m’apprend de plus ?) et d’exploitabilité (je peux la réutiliser et je sais comment). Sans confiance et sans utilité, on n’a plus d’information mais de l’in-information ou de la dés-information.

Notre horizon numérique est couvert de ponts informationnels qui se combinent, se chevauchent, se croisent, si nombreux que l’on a du mal à s’orienter dans cette jungle de ponts : de la passerelle au viaduc, des massives piles au pont flottant, du pont suspendu au pont d’Avignon…

Il apparaît indispensable de recourir à un architecte de l’information mais aussi à un urbaniste des systèmes d’information si on ne veut pas se retrouver dans un monde numérique enchevêtré à la mode de Piranèse où l’on ne sait plus très bien si on monte ou si on descend, si on recule ou si on avance. Et bien sûr, pour rendre tout cela possible, il faut des lois, des règles, une gouvernance.


 NOTE : Cette tribune libre est extraite du livre blanc de la gouvernance de l’information.

Elle a été réalisée par Marie-Anne Chabin, Blogueuse, Présidente du cabinet Archive 17, enseignante au CNAM et secrétaire général de l’association du CR2PA, pour la promotion de l’archivage managérial – blog: www.marieannechabin.fr